« Toute personne handicapée a droit à la solidarité de l’ensemble de la
collectivité nationale, qui lui garantit, en vertu de cette obligation
nationale, l’accès aux droits fondamentaux reconnus à tous citoyens.» Quels
sont les efforts faits aujourd’hui dans les festivals de musique ?
L’article premier de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits
et des chances, la participation et la citoyenneté et la participation des
personnes handicapées s’adresse à plus de 5 millions de personnes en situation
de handicap. Une ambition qui s’inscrit dans une volonté de renforcer
notre cohésion nationale pour davantage de justice et donc davantage d’attention
aux plus vulnérables, pour une échéance à 2015.
Si tous les diagnostics devaient être terminés
en 2011, il faut bien reconnaître que les autorités trainent la patte. Côtés
festivals de rock, des efforts sont faits sous l’influence de l’Association
ARGOS, qui propose un audit des besoins et des solutions pratiques à mettre en
place, ou encore Ryadh Sallem et son Défestival annuel, organisé au Champs de
Mars, par et pour les handicapés. D’autres personnes travaillent dans ce sens,
comme Jérémy Boroy, sourd lui-même, et son expertise pour les grands meetings
de la Présidentielle. Denis Leroy (ARGOS) rappelle très justement que nous
pouvons tous nous trouver en position de handicap : « Le gamin avec son
casque anti-bruit, la personne de petite taille, l’illettré qui a besoin de
pictos pour s’orienter, les accidentés de la vie ». Il existe pourtant des
solutions simples à mettre en place pour assurer la sécurité et l’accessibilité
à tous dans les grands festivals. Encore faut-il le faire savoir, certains
festivals sont en effet accessibles mais ne communiquent pas. Pourtant rien de
plus simple via les infos pratiques sur les sites Internet.
INTERVIEW de Denis Leroy
Directeur du Bureau d’études Argos Services (Accessibilité, repérage, guidage, orientation, sécurité) qui gère les handicapés de l’école à la maison de retraite
« Bon
sens et professionnalisme pour re-simplifier ce qu’on a compliqué »
Quelle est votre
expertise ?
ARGOS Services est une association qui compte 700
membres dont 250 salariés pour 7 structures de gestion du handicap dans le quotidien.
Nous regroupons tous les corps de métiers, ergothérapeutes, instructeurs en locomotions,
architectes, économistes de la construction, pour répondre aux questions de
l’accessibilité, émanant principalement des établissements recevant du public
(écoles, collectivités, maisons de retraites).
Depuis combien de temps
mettez-vous votre expertise à disposition des festivals de rock ?
Dès 2008, les
Eurockéennes de Belfort sont devenues le premier grand festival à penser et
mettre en œuvre un dispositif spécifique d’accueil et d’accompagnement des
personnes handicapées. On a intégré l’équipe d’organisation pour que le handicap
soit pris à tous les niveaux. C’est une politique transversale, volontariste.
L ‘Accessibilité c’est simple. Ce n’est pas la peine de placer
un podium pour fauteuil roulant au milieu de l’herbe sans chemin d’accès. Vouloir
bien faire ne suffit pas : mettre une rampe au distributeur d’argent mais
pas de plate-forme par exemple. Ta Poubelle tu la laisses là, elle va servir de
repères : il y a des obstacles utiles. C’est souvent des solutions simples,
pratiques, nous on a ce regard simple.
Q. Vous proposez un Kit
Accessibilité. Comment ça marche ?
En année 1, nous prêtons les solutions pour rendre un site
le plus accessible possible. Dans le même temps, nous faisons, pour un budget
d’environ 10 000 €, l’audit diagnostic (qualités, défauts, optimisation du
lieu, site Internet). L’année suivante, pour le même coût, le festival peut
s’offrir le matériel. Une fois le diagnostic fait, il intègre le cahier des
charges et la formation des équipes. Aux Eurockéennes, nous avons mis en place
un QR-Code qui, placé en différents endroits, permet de diffuser des
information “pour tous”, accessible aux aveugles, malvoyants et valides ;
Elle
propose également de nouveaux plans tactiles, des programmes en Braille et en
gros caractère.
Un fabricant local français met gracieusement à disposition des
fauteuils roulants tout terrain (2KS – Fauteuil TRACE). D’autres festivals ont
répondu présents, comme les Vieilles Charrues. Le bouche à oreille a
fonctionné.
Q. Quelques conseils
à développer ?
L’Accessibilité c’est un VRAI métier. On a construit des instruments et des structures en commençant par la chaine de déplacement, par la signalétique qui doit être accessible à tous. « Je rentre en toute sécurité, je sors en toute sécurité, qui que je sois »
La démarche doit être volontariste, transversale et pensée en
amont. Adressez- vous à un professionnel suivant la configuration du lieu, la
météo pour des solutions vraiment adaptées.
Il faut sensibiliser toutes les équipes du festival, identifier
les populations par les préinscriptions – une démarche de l’usager et ses besoin sur
Internet. A l’organisateur de répondre à
la demande de l’usager (au moment de la rédaction du site, lister les
possibilités), donner le même pass à l’handicapé et à l’accompagnant pour
qu’ils aient accès aux mêmes espaces.
Des idées simples : placer les distributeurs banque ou
les signalétiques en braille à la bonne hauteur, prévoir une borne de recharge
pour les fauteuils électriques, placer un podium sur une colline pour une vue
plongeante en pensant au chemin d’accès proche si possible du parking dédié.
Rien que du bon sens, nous on a ce regard et cette expertise.
Catherine Dauriac
Article paru dans La revue des Festivals
Mai 2012